Écrire un roman en 6 étapes : Le mauvais pas

par | 24 Sep,22 | Mes Articles

Étape préliminaire

Une étape parfois très longue qui peut prendre plus ou moins de temps. Un livre que l’on porte parfois pendant de longues années sans pouvoir se mettre au travail et écrire.

Première étape : rencontres

Au départ, une rencontre, nécessaire mais qui ne fût pas suffisante. En 1995, lors de la préparation d’un colloque à Tahiti, je rencontrai Tobie Nathan. Cette rencontre n’était pas fortuite mais longuement désirée. Comment devenir thérapeute sans une sérieuse analyse de soi ? Des années de psychanalyse n’avaient pas suffi à démêler tous les fils d’une histoire familiale complexe, comme n’importe quelle histoire familiale. Les désordres de la seconde guerre mondiale planaient encore sur ma vie. Un père milicien trop tôt disparu pour que je puisse lui poser les bonnes questions, un silence familial oppressant entouré de fragments de vérités rendant la réalité encore plus opaque. Les thérapies familiales m’avaient apporté un éclairage complémentaire.
Seul un ethnopsychiatre juif pouvait m’autoriser et me conseiller fermement d’aller aux archives voir ce qu’il en était, mais il fallait encore attendre des années, avant de recueillir ces bribes éparses, et de vouloir en faire un roman.
En 2018, lasse de mes gribouillis et de n’avoir jamais rien terminé, je décidai de m’inscrire à un atelier d’écriture animé par Jean Marc Quaranta, à l’AMU ( Aix Marseille Université), à Aix En Provence. Ce fut un véritable plaisir tout au long de cette année de partage et de découverte, et cet accompagnement par un animateur hors pair devint un incroyable déclencheur avec le soutien du groupe pour me mettre enfin à un véritable travail d’écriture.
Deux rencontres donc indispensables à tellement d’années d’intervalle.

Deuxième étape documentation

 

Parmi les livres présentés, pour ceux qui s’intéressent à l’histoire de cette période, je recommande la lecture de l’histoire de la milice par Jacques Delperrié de Bayac, livre passionnant montrant bien l’évolution de l’extrême droite en France entre les deux guerres, jusqu’à la défaite française, l’occupation et la création de la milice en 1943, au moment même où à Marseille les Allemands avec l’aide de la police française rasaient le quartier du Panier et faisaient une importante rafle dans la quartier de l’Opéra et de la Synagogue.
La Milice n’est pas apparue par hasard. Sans faire de parallèle avec notre époque, il me paraît important de se replonger dans l’histoire et d’analyser les mouvements profonds qui agitent notre pays de façon récurrente, racisme, antisémitisme, violence des propos haineux aujourd’hui largement banalisés par les réseaux sociaux.
Je recommande pour Marseille la lecture du livre de Robert Mencherini qui décrit fort bien le lourd tribu qu’a payé cette ville sous l’occupation, ainsi que la Résistance.

Troisième étape des lectures inspirantes

Après la documentation, ci-dessus, une faible partie de la lecture de textes lus et relus pendant la phase d’écriture.
Parmi ces livres, tous appréciés lors de ma phase d’écriture, j’ai été impressionnée par la lecture de HHhH de Laurent Binet.
C’est avec une grande élégance que l’auteur nous montre la lutte entre documentaire et fiction lorsque le poids des faits historiques est si lourd dans l’élaboration d’un roman. Une œuvre passionnante sur Heydrich, le cerveau de Himler, et planificateur de la solution finale, et sur les deux parachutistes tchèques chargés de l’assassiner à Prague en 1942.
J’ai aussi particulièrement apprécié le Monarque des ombres de Javier Cercas, et les difficultés du narrateur de raconter l’histoire de l’un de ses parents, engagé du mauvais côté dans cette terrible guerre d’Espagne, et mort à l’âge de 19 ans, la gloire de la famille phalangiste, et la honte. Chercher à comprendre sans avoir à juger, est un long itinéraire dont Javier Cercas nous montre la voie, avec les doutes, les ambiguïtés inhérentes à toute personne humaine, le tout avec un immense talent.
 » Un littérateur pourrait répondre à ces questions car les littérateurs peuvent affabuler, pas moi: l’affabulation m’est interdite. « 
« Je ne peux que m’en tenir aux faits, certaines choses sont avérées. Ou presque avérées.
Car le passé est un puits insondable et noir où l’on arrive à peine à percevoir des étincelles de vérité , ce que nous savons est sans doute infiniment plus petit que ce que nous ignorons …. »Savoir, ne pas juger, comprendre  » , dit l’auteur à son cousin . » C’est à ça qu’on s’emploie , nous les écrivains  » .

Quatrième étape des poètes inspirants

Passionnée de poésie depuis ma plus tendre enfance, j’ai décidé de mettre un vers évocateur en tête de chaque chapitre du livre plutôt que de mettre un numéro ou un autre texte. J’ai fait appel à Aragon découvert en classe de troisième avec la Diane française : la rose et le réséda : celui qui croyait au ciel, celui qui n’y croyait pas Tous deux adoraient la belle prisonnière des soldats.
Aragon longuement réécouté avec la mise en musique de nombre de ses poèmes par Léo Ferré en 1961 : est-ce ainsi que les hommes vivent ?
Léo Ferré un de mes auteurs compositeurs préférés, tout comme Jean Ferrat. Je n’oublie pas Anne Sylvestre qui souffrit elle aussi d’avoir eu un père collaborateur. Ce père quel qu’il soit je l’aime. Ça ferait du bien à qui que je le renie ? Je voudrais simplement pouvoir lui parler là maintenant et comprendre, a-t-elle écrit à Pierre Rigoulot, dans les Enfants de l’épuration. Ses chansons sur la condition féminines ont éclairé quelques chapitres.

Le livre comprend trois parties :

I Est-ce ainsi que les hommes vivent ?

II On part dieu sait pour où… Ça tient du mauvais rêve

III Tu n’en reviendras pas

Louis Aragon

Au gré de la lecture quelques vers titres de chapitre très évocateurs du contenu

C’était un temps déraisonnable Louis Aragon
Dans mon cœur maintenant Il est d’immenses taches Fernando Pessoa

Le vent se lève, il faut tenter de vivre Paul Valery

Écrire pour se sauver de l’oubli Anne Sylvestre
Et c’est ma mère ou bien la votre
Une sorcière comme les autres Anne Sylvestre

La solitude alors s’en va au fil des fleuves Rainer Maria Rilke
Allez ! Tout fuit ! Ma présence est poreuse Paul Valéry
Et tout continue, se hâte vers la fin Rainer Maria Rilke

Vie, frayeur, affliction, Voilà tout ce qui reste
Pourquoi donc ces douleurs
Si tout est incertain Fernando Pessoa

Et ceux qui quittent le village vont très loin
Et beaucoup meurent en chemin Rainer Maria Rilke

Penses-tu donc que l’on se voit sombrer ? Rainer Maria Rilke
J’ai usé de mes prières les barreaux de vos prisons Anne Sylvestre
Je me souviens des jours anciens Et je pleure Paul Verlaine

Et n’être qu’un homme qui passe
Tenant un enfant par la main Victor Hugo

La joie venait toujours après la peine Guillaume Apollinaire

Nulle lettre… Nul nom,
Et dehors, nulle tombe Rainer Maria Rilke

Dernière étape la promotion

il ne reste plus qu’a diffuser et vendre le livre !

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