Le Japon au pays de Pagnol 

par | 24 Oct,22 | Poèmes et proses brèves

Il faut mériter cet espace. On y arrive par un chemin tortueux, une de ces interminables traverses marseillaises où le plus souvent on ne se croise pas, où la lenteur est de rigueur et la prudence indispensable.
Là se trouvent les collines de Pagnol, on est tout près de la Treille, du jardin on aperçoit le clocher de l’Église, en bas de la traverse court le Ruissatel, la chaîne des collines en fond de paysage rythme l’horizon. Des cyprès, des oliviers, des pins, on est bien en Provence.
La demeure est bien cachée derrière son portail opaque, il faut l’apprivoiser.
Mes deux amis m’accueillent avec chaleur sur le pas de la porte d’une maison dont je ne devine toujours rien, une avancée de toiture et quelques poutres seulement m’apparaissent.
Je suis habituellement très sensible aux lieux et à l’atmosphère que dégage toute habitation ou tout monument.
Dès l’entrée, je suis saisie, le mot n’est pas trop fort par une émotion prégnante que je ne peux nommer. Un patio baigné de lumière et quelques arbustes, cela peut être banal, mais celui-ci instaure une ambiance étonnante dans une harmonie de courbes et de triangles, intérieur et extérieur ne font plus qu’un. Je ressens un bien-être intense et une douce paix bercée par les paroles de mes deux amis m’envahit.
Une courbe à gauche m’incite à aller plus avant, quelques étoiles lumineuses au sol guident le chemin. Mes hôtes me guident dans cette maison dont je sens vibrer l’âme, et me racontent son histoire, sa conception par un architecte japonais désireux d’adapter son art à la vie provençale, et je dois dire que c’est très réussi.
Dans le vaste séjour intérieur et extérieur sont en harmonie totale, tout est fluide, les baies vitrées à l’ouverture en galandage s’effacent à la demande et le jardin s’invite au plus près.
Je ressens cet art de vivre à la japonaise, je me laisse impressionner par ce concept d’emprunt de paysage le « shakeÏ » qui nous paraît si étrange, cette manière de placer une fenêtre qui de l’intérieur cadre un arbre, un jardin de galets, une vue intime en évitant une vue moins esthétique. Et j’aime cette idée d’emprunter le paysage pour en faire un décor à part entière.
Cette maison cache bien son jeu. Au vaste lieu de vie de plain-pied, s’adjoint un étage qu’on ne saurait deviner et un sous-sol confortable tout aussi discret. La maison s’accorde parfaitement à son environnement, au terrain pentu, au cheminement de la lumière et du soleil.
Cette maison ressemble à mes hôtes, je suis heureuse pour eux qu’ils aient pu la trouver.
C’est Baudelaire qui me vient à l’esprit, l’invitation au voyage.
Là tout n’est qu’ordre et beauté
Luxe calme et volupté.

Noëlle Barbiera

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